historique
Histoire de la chapelle
La Chapelle au Pied-du-Lac témoigne d’une histoire bien particulière, celle de l’existence entre 1909 et 2010 d’une petite communauté protestante francophone dans le Bas-Saint-Laurent.
La population de langue française du Québec était, à ce moment, presque exclusivement de confession catholique.
Comment expliquer ce phénomène? Au début du 20e siècle, 3 évènements historiques se déroulaient presqu’en même temps sur le territoire de la future municipalité de Rivière-Bleue, soit:
- la construction du chemin de fer traversant le Canada,
- l’impressionnante richesse de la ressource forestière du territoire,
- l’ouverture de la colonisation qui donnait à des colons l’accès à des terres vierges.
Pendant ce temps en Nouvelle-Angleterre
Simultanément, en Nouvelle-Angleterre, se déroulait un autre phénomène, celui d’une crise dans la production textile. Alors que durant les décennies précédentes de nombreux canadiens-français étaient partis en masse travailler dans les filatures américaines, plusieurs d’entre eux, par manque de travail, choisirent de revenir au Québec.
Les nouveaux attraits économiques du Témiscouata en attirèrent ainsi plusieurs.
Les années passées en Nouvelle-Angleterre avaient amené plusieurs de ces Canadiens-français à connaître les principes de la Bible, de ses évangiles et de la possibilité d’un lien plus direct avec Dieu, principes enseignés par les églises protestantes. Certains d’entre eux adhérèrent à ces nouvelles valeurs religieuses. Nouvellement convertis au protestantisme, ils formèrent un petit groupe d’arrivants qui s’installa au Pied-du-Lac-Long et dans ses environs.
Une communauté qui s'organise
Ils eurent bientôt besoin d’un guide spirituel. On fit alors appel à la Mission de la Grande Ligne, organisme appartenant à l’une des branches des églises protestantes: les évangélistes-baptistes. Cette corporation avait une vocation de soutien, d’éducation et d’évangélisation auprès de ses membres.
- Dès 1909, la Mission de la Grande Ligne fournit les services d’un pasteur à la communauté en la personne de monsieur Napoléon Aubin, remplacé, deux ans plus tard par monsieur Henri Lanctin.
- En 1910, deux membres de l’église, messieurs Luc Pelletier et Joseph Gaudreau, cèdent un grand terrain sur lequel on déménagera une vaste maison qui servira de résidence au pasteur, de lieu de culte aux membres et d’école à leurs enfants.
- En 1919, monsieur Lanctin revient après 5 ans d’absence. Il agira comme ministre du culte jusqu’en 1926.
- En 1920, la communauté évangélique-baptiste du Pied-du-Lac-Long compte plus de 225 fidèles constituée d’arrivants de la Nouvelle-Angleterre, du Nouveau-Brunswick, et de nouveaux convertis des environs. Les infrastructures existantes sont devenues insuffisantes pour répondre aux besoins des membres.
En janvier 1922, on inaugure donc l’Église évangélique-baptiste du Pied-du-Lac-Long, qui servira de lieu de culte. La partie arrière deviendra une école primaire pour les enfants de la communauté, et ce, jusqu’en 1956, alors qu’une nouvelle école sera construite.
Être protestant, ce n'est pas facile
À cette époque et dans ce lieu, être protestant n’est pas facile. La présence de ce petit groupe de dissidents constitue un danger pour l’Église catholique, qui a une forte tendance à diaboliser le phénomène. La méconnaissance amène trop souvent l’intolérance et celle-ci conduit les gens au sectarisme.
Dans les années qui suivirent, les rapports entre les membres des deux communautés furent trop souvent marqués par des réactions de craintes et de fermeture à l’autre. Il est tout de même important de souligner que certaines situations provoquées par les nécessités de la vie ont permis des rapprochements, créant ainsi quelques belles histoires de collaboration et parfois même d’amitiés qui, encore aujourd’hui, portent leurs fruits.
La détermination d'une petite communauté
Les années 40, 50 et 60 sont de plus en plus difficiles pour cette petite communauté, qui voit ses membres partir les uns après les autres vers des lieux où ils pourront plus facilement assurer leur survie économique. Il n’y a plus de pasteur résident et l’école souffre d’une constante baisse de fréquentation scolaire.
À partir de 1970, la petite école primaire du Lac-Long ferme définitivement ses portes et les enfants sont intégrés à celle de Rivière-Bleue. Les ressources pour la subsistance de la communauté deviennent aléatoires. Malgré tout, les membres restant se mobilisent à trois reprises pour restaurer et préserver leur église ainsi que leur cimetière, ce qui permet, encore aujourd’hui, d’apprécier le bon état des lieux. Les familles Lafontaine et Lepage sont à la base de cette mobilisation.
La révolution tranquille, l'époque qui crée des rapprochements
Dans les années 70, la Révolution tranquille du Québec marque la séparation de l’Église et de l’État et amène des changements significatifs:
- C’est la fin de la gestion de l’Éducation et de la Santé par l’église catholique,
- c’est le début de l’accès à l’éducation pour tous,
- c’est le rejet de la pratique religieuse dans l’ensemble de la province.
Ce nouveau phénomène permettra plusieurs rapprochements entre les enfants des 2 communautés et réduira leurs différences par leur désir commun d’une meilleure société pour l’ensemble de la population québécoise.
Les années 2000, la renaissance symbolique
En 2000, le site est concédé à L’Église pentecôtiste de Rivière-du-Loup. Les membres de cette communauté tenteront, durant 15 ans, de maintenir ses activités en tant qu’instance religieuse.
En 2016, après une mise en vente de la propriété, à l’initiative de certains membres de la famille Lepage, une corporation à but non lucratif est constituée. Cette dernière fait l’acquisition de la propriété.
Les objectifs de cette corporation sont d’abord la sauvegarde du site et la promotion de son histoire. Son second mandat consiste à encourager et développer des activités culturelles et sociales, ce qui permettra de meilleurs échanges entre les individus de la région.
Cette initiative a été particulièrement bien reçue par de nombreux résidents des environs. Plusieurs se sont impliqués de façon significative dans la prise en charge de cette chapelle et de sa nouvelle mission.
Nous nous retrouvons maintenant devant une histoire à suivre et à poursuivre.
L’architecture de la chapelle
Son plan rectangulaire simple présente une façade en forme de fronton avec des retours de corniche comme unique décor. Les bardeaux de bois des murs et de la tour clocher ajoutent à la simplicité de cette chapelle typique d’un milieu forestier.
Delphice Goyette, architecte, en a conçu les plans et Henri Lanctin s’est vu confier la supervision de la construction du temple. À l’arrière du bâtiment, on avait aménagé un local qui a servi d’école jusqu’en 1953. Juste à côté de l’église, on retrouve encore le cimetière.